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Homélie pour le 2 novembre 2022 :

Commémoration des fidèles défunts


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La charité - l'amour - nous presse de prier pour nos frères défunts en ce jour du 2 novembre tellement nous souhaitons le bonheur de ceux qui nous ont donné la vie, qui nous ont fait tant de bien sur cette terre, ou tant de mal !


Pour que nous comprenions l'importance de notre prière pour l’âme des défunts, j’aimerai m'appuyer sur ce que Saint-Augustin dit dans son "Traité sur l'Évangile de Saint-Jean" au chapitre 23.


Inconstance de nos âmes et constance de Dieu

Saint-Augustin nous aide à comprendre l’importance de la prière pour les défunts en comparant l’immortalité de l'âme et l'éternité de Dieu : quelle différence existe-t-il entre une âme immortelle, et Dieu qui est éternel ?

L’évêque d’Hippone souligne qu'à la différence de Dieu qui n’est pas sujet à des changements ou variable, notre âme spirituelle est en perpétuelle inconstance :


…. l’Evangile dit que « Dieu est un esprit ». Mais élève-toi au-dessus de tout esprit variable ; élève-toi au-dessus de tout esprit qui sait aujourd’hui, qui ignorera demain ; qui se souvient maintenant, et qui tout à l’heure oubliera ; qui veut ce qu’il ne voulait pas précédemment, et qui ne veut plus ce qu’il voulait ; il ne s’agit point ici d’esprits aussi inconstants ou sujets à le devenir ; éloignes-en ta pensée. En Dieu, rien qui puisse se modifier, rien qui soit maintenant différent de ce qu’il était tout à l’heure ; car, où tu vois tantôt une manière d’être, et tantôt une autre, il y a une sorte de mort, puisque mourir, c’est cesser d’être ce qu’on était. On dit que l’âme est immortelle: oui, sans doute, puisqu’elle vit toujours, puisqu’elle est douée d’une vie qui ne finit pas; mais sa vie est sujette au changement; en raison des innombrables modifications qu’elle subit dans le cours de son existence, on peut dire qu’elle est mortelle : en effet, qu’elle vive selon les règles de la sagesse, bientôt elle déchoit et meurt en devenant moins bonne ; si, au contraire, elle s’inspire d’abord de principes mauvais, et qu’elle en adopte ensuite de plus conformes au bien, elle meurt encore, puisqu’elle devient meilleure. ("Traité sur l'Évangile de Saint-Jean" 23, 9)


La simple expérience de notre vie quotidienne nous met en effet face à notre versatilité :

- Nous aimons un jour, nous n’aimons plus le lendemain,

- Nous faisons miséricorde un jour, le jour suivant nous ne parvenons pas à pardonner.

- Nous décidons un jour, nous renions notre décision le lendemain,

- Notre mémoire oublie un fait un jour et s’en souvient le lendemain, …..


Notre âme est bien marquée par une inconstance permanente et si Saint Augustin reconnaît l’immortalité de l’âme, en même temps il compare cette versatilité à des morts et remises en vie successives : incapable d’espérer un jour -morte en espérance-, notre âme peut espérer le lendemain…. ou le contraire.


Dieu est tout autre : son amour ne change pas, sa miséricorde est constante, sa volonté est immuable, sa morale d’amour ne varie pas….. : Dieu est esprit, éternel et constant.


Notons d’ailleurs que l’inconstance humaine est épuisante pour nous, comme pour nos proches : plein de joie un jour, plein de tristesse le lendemain….. Les passions nous agitent et les vices épuisent la vigueur de notre âme.



Entrer dans la stabilité de l’amour divin :

Notre vie entière est un exercice pour nous faire entrer dans la stabilité de l’amour divin, et, au Purgatoire, toute marque d’inconstance dans la charité sera purifiée.

Notre prière et la célébration de Messes contribuent au bien de l’âme de nos défunts. La messe tout spécialement car elle n’est pas qu’une prière humaine, mais étant l’actualisation du Mystère de la Croix, instituée divinement par le Christ, elle est source certaine et intarissable de grâce pour l’âme qui est confiée par l’intention de messe au prêtre. Le Sang du Christ –c’est-à-dire Sa Charité- touche l’âme du défunt, purifie et libère une âme de sa peine due à son inconstance passée. Nous offrons de la joie, de la fraîcheur de la respiration à nos défunts. (la liturgie parle dans la 1ère Prière Eucharistique de locum refri¬ge¬rii, lucis et pa¬cis, : « accordez, nous vous en supplions, le lieu du rafraî¬chissement, de la lumière et de la paix »).


Participer à la substance divine :

Et c’est là que Saint Augustin intervient encore avec profondeur : il souligne que pour pouvoir devenir éternel il nous faut entrer en contact et être pénétré, imprégné de l'éternité de Dieu, de la substance divine.

« Il nous a donc appris que l’âme humaine, l’intelligence raisonnable, qui nous anime et nous distingue de la bête, ne peut trouver ni son aliment, ni son bonheur, ni son illumination que dans une certaine participation de la substance divine / ….. / pour elle, la science du véritable bonheur se trouve uniquement dans la jouissance de cette vie toujours nouvelle, à l’abri de toute vicissitude, et éternelle, qui fait le propre de la substance divine » (Traité sur l'Évangile de Saint-Jean" 23, 5)


Prenons une comparaison toute simple lorsque nous avons un tissu blanc et que nous souhaitons le teindre nous prenons un liquide -une teinture- et nous plongeons ce tissu dans cette teinture : il en ressort rouge grenat, ou bleu azur, ou autre encore …. Plus ce tissu est plongé longtemps et plus les fibres sont profondément imprégnées de la teinte par participation.

De la même manière notre âme doit être immergée, plongée (c’est à dire baptisée), dans la substance divine. Cette substance divine est à la fois la grâce (enrichissement de la substance de notre âme) et à la fois l'inhabitation de Dieu (présence divine en nous).

Sur terre, Dieu vient enrichir et habiter notre âme, il la perfectionne en développant en nous les vertus et les dons.


Au Purgatoire, Dieu expurge de nous tout mal et toute peine incrustée, conséquences du péché. Le Purgatoire est donc bien une libération, une purification douloureuse mais nécessaire et la messe célébrée répand en l’âme cette libération.

En Enfer, aucune participation à la substance divine…. L’enfermement dans le péché est un refus de participer à l’amitié avec Dieu.


Saint-Pierre dans sa 2nde Epître souligne la finalité de notre vie (2, 3-4) : « Sa puissance divine nous a fait don de tout ce qui permet de vivre avec piété, grâce à la vraie connaissance de celui qui nous a appelés par la gloire et la force qui lui appartiennent. De la sorte nous sont accordés les dons promis, si précieux et si grands, pour que, par eux, vous deveniez participants de la nature divine, et que vous échappiez à la dégradation produite dans le monde par la convoitise. »


« Participer à la nature divine » telle est bien la finalité de notre vie pour notre éternité, telle est bien la raison pour laquelle l’Eglise célèbre la messe et prie pour les défunts : elle veut imprégner de Dieu l’âme des défunts (et également des vivants).


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